« Sous les décombres » : le théâtre au service de la mémoire palestinienne

La pièce Sous les décombres, première production du Théâtre régional M’hamed-Benguettaf de Naâma, a été présentée mercredi 25 décembre dans le cadre du 17ᵉ Festival national du théâtre professionnel. Destinée à un public adulte, cette œuvre poignante écrite par Anouar Smalah et mise en scène par Laïd Benamara plonge le spectateur dans l’univers oppressant de Ghaza, symbole d’une résistance inébranlable face à l’oppression israélienne.
L’histoire s’articule autour d’une famille palestinienne tentant de survivre sous l’occupation dans la bande de Ghaza. Abdoullah, jeune photographe, met sa vie en péril pour documenter les atrocités de la guerre à travers son objectif, dans l’espoir de dévoiler ces injustices au reste du monde. Son père, Abou Abdoullah, s’engage quant à lui dans une mission différente mais tout aussi risquée : protéger des manuscrits et des documents historiques retraçant l’histoire glorieuse de la Palestine. Ces précieux témoignages, il cherche à les transmettre aux combattants pour les mettre à l’abri des bombardements et du pillage sionistes.
L’intrigue prend un tournant décisif lorsque Abdoullah sauve une journaliste américaine, piégée dans une embuscade alors qu’elle couvre les événements à Ghaza. Emmenée dans sa famille, la journaliste révèle porter des documents secrets impliquant plusieurs nations dans des accords avec Israël et dénonçant l’utilisation d’armes interdites à l’échelle internationale.
Entre narration et critique
Dans sa volonté de mêler le personnel et le politique, Sous les décombres dépeint à la fois les tragédies familiales et le combat collectif du peuple palestinien. La pièce documente les souffrances et la résilience face à une guerre interminable, offrant un miroir à la fois réaliste et dramatique de la condition palestinienne contemporaine.
Cependant, cette ambition narrative a suscité des critiques lors du débat qui a suivi la représentation. Le professeur Allaoui a regretté un recours excessif aux slogans médiatiques au détriment de la profondeur dramatique. Selon lui, le texte manque de subtilité pour capturer pleinement l’horreur de la guerre à Ghaza. Il a également pointé du doigt la longueur des scènes et des transitions, qui auraient freiné le rythme et atténué l’impact émotionnel.
D’autres intervenants, comme le professeur Hamdani, ont évoqué une certaine monotonie dans le jeu des acteurs, qui aurait réduit l’intensité dramatique. « Les personnages semblaient parfois distants, limitant ainsi l’immersion du spectateur », a-t-il commenté.
Face à ces reproches, le metteur en scène Laïd Benamara a défendu son œuvre avec conviction. « L’horreur que traverse Ghaza est d’une intensité indescriptible. Aucune scène ne peut prétendre en rendre pleinement compte, c’est pourquoi nous avons choisi une approche mesurée », a-t-il expliqué. Il a également évoqué des contraintes techniques ayant influencé la fluidité des performances, tout en soulignant le défi que représente la traduction scénique d’une réalité aussi bouleversante.
Entre volonté de témoignage et exigences artistiques, Sous les décombres s’impose comme une œuvre engagée. En mettant en lumière les sacrifices et la lutte d’un peuple opprimé, la pièce interpelle et incite à la réflexion. Elle rappelle que, malgré les failles relevées, le théâtre reste un puissant vecteur de résistance et de mémoire.